RECHERCHE

▪ Biographie

Docteur en médecine, fils d’un négociant en verres parisien originaire de Colmar [1], il épouse en 1854 une institutrice champenoise puis s’installe l’année suivante à Saint-Maur, où son père s’est retiré. Il sera d’abord au 19 rue du Four, puis au 24, enfin au 22. La commune n’a que trois médecins : Tourasse, Bitterlin et Piettre. Lors du siège de Paris en 1870-1871, où va intervenir pour la première fois la Croix-Rouge au secours des blessés, il est chirurgien-major au 50e bataillon de la garde nationale. Le 10 septembre, il fonde avec Molin, ancien maire, Colombel, l’abbé Colomb, Chauré, l’épicier Boizot et Sallefranque le Comité local de la Croix-Rouge – alors appelée Société de Secours aux blessés militaires. Il crée aussitôt une ‘ambulance’ (hôpital temporaire) de dix lits chez lui, avec l’aide du curé, l’abbé Collomb, et du pharmacien Sallefranque, futur maire, Puis les blessés sont transférés à l’école du Parangon (Joinville), réquisitionnée par la Société de Secours, où officie le Dr Dupertuis, de Champigny, ancien médecin du chantier du chemin de fer. Les blessés sont si nombreux qu’on a installé des sortes d’hôpitaux dans les maisons du quai Beaubourg et le long de la route de Joinville à Champigny, avec l’aide de 50 médecins, 200 frères de la Doctrine chrétienne et dix ambulances de la Société de Secours. On y réconforte lers blessés avec un café ou un bouillon avant de les évacuer par bateau-mouche vers Paris, par le canal de Saint-Maur.

Le Dr Bitterlin s’installe ensuite dans le pensionnat de jeunes filles des Dames du Saint-Sacrement, boulevard Maurice-Berteaux, à l’emplacement du lycée Marcelin-Berthelot, avec les seuls civils restés sur place, soit quinze personnes, dont deux des sœurs. 141 hospitalisés vont y être soignés malgré une forte épidémie de variole. La municipalité temporaire réfugiée à Paris leur refuse son aide au prétexte qu’il s’agit d’une maison religieuse. Élie Bitterlin joue un rôle très actif pendant les combats de Champigny, recevant ou ramassant lui-même les blessés lors des trèves : c’est ainsi qu’il soigne le général Paturel au Plant de Champigny ou qu’il ramène le jeune allemand Carl Geyer. En décembre, lors de la contre-offensive prussienne, le pays est abandonné. Seule la Croix-Rouge reste sur place tandis qu’une pluie de fer s’abat début janvier sur Saint-Maur et Joinville : 7 000 projectiles selon l’abbé Collomb. Bombardé, le Parangon, où auront été soignés 329 blessés, est évacué le 9 janvier. Au Saint-Sacrement, un obus transperce la chapelle et un autre la salle des malades. Le personnel refusant de partir, le colonel du génie de Mirandol fait blinder le bâtiment. Un jeune soldat allemand prisonnier et blessé a longuement témoigné du courage, de l’amabilité et de l’humanité du Dr Bitterlin, qui lui attiraient le respect de tous, en particulier des gardes mobiles indisciplinés. Le 31 janvier, les Allemands font évacuer le Parangon et le Saint-Sacrement et s’y installent. Ils y recevront en mars la visite du roi Charles de Wurtemberg.

Après la guerre, le Dr Bitterlin fait des recommandations sur la nécessité de constituer des réserves de matériel de secours et de prévoir de nombreux petits hôpitaux temporaires en cas de guerre. Ces principes seront appliqués en 1914-1918. Il découvrira également un remède contre le typhus des poules.

Pierre GILLON

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▪ Note

[1] Le petit-neveu d’Élie-Laurent, le maître-verrier Paul Bitterlin, fut l’auteur en 1861 des vitraux de la chapelle Saint-Hilaire de La Varenne bâtie par Caffin d’Orsigny.

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▪ Bibliographie

  • E.-L. Bitterlin, Croix-Rouge française... Comité de Saint-Maur : son hôpital temporaire aux avant-postes... pendant la durée du siège de Paris, Saint-Maur, 1892, 48 p. ;
  • C. Geyer, Erlebnisse eines Württembergischen Feldsoldaten im Kriege gegen Frankreich und im Lazaret zu Paris 1870/71, München, 1890, 240 p., rééd. dans C. Geyer, Verwundet und Kriegsgefangen in Paris unter dem Schutze des Roten Kreuzes 1870/71 : Kriegserlebnisse eines Württembergers, Stuttgart, 1910 ;
  • G. Bitterlin, La Croix-Rouge aux avant-postes de la Marne pendant le siège de Paris : 1870-1871, Paris, 1912, 79 p. ;
  • G. Bitterlin, « Vieux souvenirs sur l’emplacement du lycée Marcelin-Berthelot », Le Vieux Saint-Maur, n° 14, 1939, p. 8-11 ;
  • A. Colnat, « Les souvenirs d’un soldat allemand sur Saint-Maur en 1870-1871 », Le Vieux Saint-Maur, n° 25 et 26, 1951, p. 149-156 et 165-172 ;
  • G. Cot, « La guerre de 1870-71 à Saint-Maur », Le Vieux Saint-Maur, n° 50, 1970, p. 116-124 ;
  • J. Roblin, Et Ducrot passa la Marne, 30 novembre 1870, Champigny, 1971, rééd. sous le titre Les combats du siège de Paris en Val-de-Marne, Le Mée-sur-Seine, 1987.